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La première circulaire

 

La première circulaire

Célestin Freinet, un éducateur pour notre temps

Michel Barré

 

En juillet 1926, six écoles possèdent l'imprimerie, plusieurs projettent de s'en procurer une avant la rentrée. Freinet rédige sa première circulaire (deux pages dactylographiées avec papier carbone). Elle est adressée le 27 juillet à Daniel (Finistère), Primas (Rhône), Mme Alquier (Hérault), Bordes (Dordogne), Mlle Ripert (Algérie), Alziary (Var), Van Meer (Belgique) et Ferrière (Suisse). Comme on le voit, une dissémination géographique qui favorisera l'implantation au niveau national.

Afin de constituer le jumelage des classes pour les échanges quotidiens (on ne parle pas encore de correspondance interscolaire), Freinet demande à chacun de préciser le niveau de sa classe, le nombre de divisions, le milieu local, les préférences personnelles. Quelques semaines plus tard, un seconde circulaire donne la répartition des paires : Freinet-Daniel; Alziary-Bordes; Primas-Mlle Ripert. Pour le moment, les échanges quotidiens ne peuvent se faire avec l'étranger à cause des tarifs postaux. Freinet indique les modalités de l'échange .

L'échange doit se faire le plus régulièrement possible. Votre classe doit tirer, de chaque imprimé, un nombre d'exemplaires légèrement supérieur à l'effectif de la classe correspondante. Ces imprimés doivent être à peu près parfaits comme correction du texte et netteté de l'impression . C'est une condition essentielle; on y arrive très vite (Mettez-vous en rapport avec l'instituteur correspondant pour vos besoins mutuels. Vous pourrez, par la suite, échanger des cartes postales, des travaux manuscrits, etc...)

Nos imprimés voyagent comme Périodiques . Pour cela il faut :

1°/ Que chaque imprimé porte une mention uniforme. Consacrez-y un composteur dont vous ne changerez que la date et le numéro (de la page). Par ex : Journal de classe ... N°... Bar-sur-Loup 3 oct. 1926.

2°/ Mais cela ne nous donne cependant pas le droit légal de faire circuler nos imprimés comme Périodiques. C'est pourquoi je vous recommande de demander la permission à votre Receveur des Postes., en citant les nombreux précédents (2 en juin 26, NDLR). Si quelque bureau refusait ce service, nous aviserions un autre moyen.

3°/ Il y a avantage à imprimer les adresses, avec la mention Périodiques. Cela donne une meilleure allure.

4°/ On peut joindre des dessins à l'envoi mais jamais de manuscrit.

5°/ Ne pas fermer l'enveloppe.

L'envoi ainsi fait ne coûte que 0,02 F par 50 gr.

Il faut vous appliquer avant tout à imprimer la vie réelle de votre classe. C'est la chose qui intéresse le plus les petits correspondants.

J'ai pensé qu'un seul échange quotidien suffit. Cela fait une moyenne de tirage de 80 - 90 exemplaires, ce qui est suffisant.

Autres échanges. Tous les 15 jours, vous expédierez aux autres classes 3 exemplaires de chaque imprimé ( dont un au moins écrit seulement au recto et pouvant être collé), soit journellement 3 x 6 = 18 imprimés supplémentaires (le 6e envoi est pour Ferrière), les faire classer après chaque tirage pour faciliter l'expédition et répartir les tâches. L'envoi se fait en Périodiques.

Les mots soulignés le sont par Freinet

Freinet indique l'utilisation qu'il préconise de ces envois supplémentaires: deux livres de vie à la disposition des élèves; un exemplaire affiché sur un "tableau mural" consacré à cette classe, en y joignant photos, cartes postales reçues. En fin d'année, échange d'autres travaux individuels et collectifs. Suivent des conseils pour le financement et pour se procurer du papier*.

Tout Freinet se trouve déjà dans ce texte : clarté des objectifs, précision technique des pratiques quotidiennes et recherche des moyens, y compris par ce qu'on pourrait appeler du bluff s'il ne s'agissait d'une anticipation sur la prochaine réalité. Il faut noter que, malgré l'emploi du mot "journal", Freinet n'envisage encore que l'envoi de séries d'imprimés identiques. La périodicité est néanmoins définie : l'envoi quotidien semble suffisant .

* A cause du coût et de la difficulté de trouver des feuilles au format de la petite presse, certains n'hésitent pas à utiliser le verso d'anciens bulletins de vote ou d'imprimés administratifs périmés.